Le destin m’a conduit trois ans plus tard à démarrer ma propre PME avec mes fils. Comme le PDG était le plus jeune de mes fils, qu’il m’appelait « papa sécurité », je me suis dit que je pourrais pleinement faire vivre la SST comme guide avec lui et avec les employés… Au début, l’entreprise n’avait pas de permis donc tout le temps d’élaborer le manuel santé-sécurité, l’identification et contrôle des risques en mode simplifié, le manuel salubrité, la totale quoi! J’avais contribué à développer ces outils avec mon implication dans le Réseau 3S&E. Petit rituel chaque matin sur les risques du jour, tout allait pour le mieux et je confirmais ainsi que la gestion de la SST passait surtout par les valeurs des gestionnaires.
Après seulement cinq mois d’opération, tout d’un coup, ce fut le succès des ventes de notre produit, un rêve pour toute nouvelle PME! La demande dépassait l’offre et les ventes étaient rentables. Augmentation de la production, crise d’approvisionnement, embauche de nouveaux employés, un vrai tourbillon! La vie d’une PME quoi! Ça allait à vitesse grand « V ». Un certain vendredi midi, je vois passer l’un de nos employés avec du sang sur la cuisse… Que se passe-t-il? Il me répond, ce n’est pas grave, une tourie de verre a cassé et je me suis coupé. Lacération profonde, la blessure a nécessité 5 points de suture et cela aurait pu être beaucoup plus grave. C’est à ce moment que j’ai pris conscience que la SST avait pris le bord. Le succès des ventes et les problèmes quotidiens de production avaient pris le dessus sur la priorité SST. Le plus embêtant, c’est que j’avais été happé moi-même dans ce tourbillon. J’ai passé par toute une gamme de sentiment… se sentir coupable, honte, échec, déception… Comment suis-je arrivé là? Moi « papa sécurité. »? Évidemment, cela a eu l’effet d’un électrochoc et il s’en est suivi un super appel à l’action SST. Pour développer la culture SST, j’avais misé beaucoup sur le coaching du DG mais force est de constater que lorsque j’ai mis du temps pour aider les employés à développer le petit rituel d’identification des risques du jour, cela a eu beaucoup plus d’impact.
Par la suite, avec cette leçon d’humilité, j’ai eu l’occasion de visiter d’autres PME du coin, subtilement aborder la SST, juste m’attarder à faire observations d’un œil externe et arriver au constat que la sécurité dans les PME c’est important mais cela tombe vite dans les secondes priorités. « Il faut que la shop fonctionne et ici on est toujours en situation de survie» m’a-t-on répété souvent. On gère la priorité du jour sans compter son temps et c’est rarement la sécurité, encore moins la santé, qui viennent en tête de liste.
Dans cet apprentissage de trois ans maintenant, dans notre petite entreprise de 6 employés, je dois accepter que la SST demeure importante dans une PME mais est rarement une priorité. Toutefois, je persiste à croire que les PME ont besoin d’aide et même si ce n’est pas le modèle idéal, l’accompagnement adapté sauvera des blessures. Si vous avez l’occasion de faire des interventions, les pistes suivantes pourront certainement avoir un impact positif dans le but de diminuer les blessures:
• Un ou deux outils de prévention SST simples mais vivants;
• Viser à développer des réflexes de gestion SST avec les dirigeants;
• Surtout développer des réflexes quotidiens d’identification et de contrôle des risques pris en charge par les employés.
Serge Bouchard
Distillerie du Fjord
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